Éditorial Volume 1 – Numéro 1
Chers Collègues, Chères Lectrices et Chers Lecteurs,
Étudiée depuis des décennies, l’immuno-oncologie est en train de révolutionner la prise en charge des cancers. L’engouement qu’elle suscite depuis ces dernières années au sein de la communauté médicale s’explique par les résultats spectaculaires observés dans plusieurs cancers, jusque-là de très mauvais pronostic, et par le nombre important de nouvelles indications à venir.
Immunologiste et biochimiste de formation, mon parcours m’a conduit tout d’abord à étudier les molécules du complexe majeur d’histocompatibilité dans le laboratoire dirigé par Jean Dausset, Prix Nobel de Physiologie et de Médecine, au Centre Hayem à l’Hôpital Saint Louis. À l’époque on considérait qu’il existait deux régions chromosomiques, ou locus, codant ces molécules. Mes travaux m’ont amenée à décrire l’existence d’un troisième locus d’histocompatibilité chez la souris (H2-L) et chez l’homme (HLA-C) ainsi que l’association des molécules d’histocompatibilité à une protéïne invariante, la beta2microglobuline. J’ai ensuite travaillé avec Hervé Fridman à l’Institut de Recherches sur le Cancer à Villejuif, puis à l’Institut Curie à Paris sur les récepteurs pour les régions constantes des anticorps, étudié leur rôle biologique, puis leur structure en collaboration avec des équipes américaines et japonaises. C’est en arrivant au Centre de Recherche des Cordeliers, en 2000 que je me suis tournée vers l’étude du micro-environnement immunitaire des tumeurs humaines, domaine qui me passionne par sa complexité et son enjeu. Aujourd’hui je m’attache, avec Hervé Fridman et mon équipe, à identifier des marqueurs d’échappement immunitaire et de résistance aux immunothérapies, en particulier dans le cancer du rein et dans le cancer colorectal.
J’ai effectué mes recherches dans le cadre d’un statut de chercheur à l’INSERM puis de professeur des universités. L’activité d’enseignante à laquelle je me suis consacrée pendant plus de 15 ans m’a permis d’acquérir une vision globale de la discipline, de diriger la traduction en langue française de plusieurs ouvrages d’enseignement de l’immunologie, et de créer le premier master d’immunologie réunissant médecins et scientifiques de trois universités parisiennes, Paris Descartes, Pierre et Marie Curie et Paris Diderot.
Au cours de ma carrière j’ai exercé les responsabilités de Présidente de la Société Française d’Immunologie, puis de Présidente de la Fédération des Sociétés d’Immunologie Européennes (EFIS) où j’ai promu le développement de l’immunologie et sa diffusion au sein du grand public, participé à la création de plusieurs prix pour la discipline, et du premier congrès pan-européen d’immunologie qui a réuni à Paris plus de 5 000 personnes. Mon engagement m’a toujours poussée à rendre visible, compréhensible et accessible au plus grand nombre les informations scientifiques ; c’est ainsi que j’ai créé le service de presse de l’institut Curie que j’ai ensuite dirigé pendant près de 15 ans, et accepté il y a trois ans la direction de la revue
« cancer immunity and immunotherapy » (IF 5.7) au sein de la collection « Frontiers in Immunology ». C’est donc avec enthousiasme et avec cette double vision : chercheuse et enseignante, que j’ai accepté d’être rédactrice en chef de la première et unique revue francophone transdisciplinaire sur l’Immuno-Oncologie.
L’immuno-oncologie s’appuie sur un système complexe, bénéficie d’avancées technologiques qui ne cessent d’évoluer et est un enjeu majeur pour les entreprises pharmaceutiques. Dans cette optique, notre ambition sera de partager avec vous, régulièrement, des informations scientifiques s’appuyant sur l’expertise de comités pluridisciplinaires d’experts nationaux et internationaux du domaine, ainsi que des éléments très pratiques sur les questions que vous rencontrez au quotidien. Nous pourrons ainsi continuer à nous former dans cette discipline et rester en alerte sur l’actualité.
En effet, malgré les résultats spectaculaires pour certains patients, l’enjeu global aujourd’hui est de comprendre comment mieux traiter (en termes de réponse, de gestion des effets secondaires, de résistances, de combi- naisons etc.). Aussi, l’approche transdisciplinaire est un élément indispensable pour la compréhension des mécanismes sous-jacents. C’est pourquoi nous privilégierons les analyses croisées effectuées par exemple par des chercheurs et des cliniciens ou par des représentants des différentes spécialités.
Forts de notre ambition, nous espérons que vous trouverez dans ce premier numéro les éléments clés pour progresser dans vos pratiques. Ce premier numéro, qui est une synthèse des 1res journées scientifiques Immunité et Cancer qui se sont déroulées en collaboration avec l’Université Paris Descartes, se compose de :
• une mise au point « L’immuno-oncologie pour les non immunologistes » ;
• un dossier thématique « Immunothérapie et R&D : quels enjeux, quelles approches et quelles perspectives ? » ;
• cas clinique « Cancer de la vessie métastatique à l’ère de l’immuno-oncologie » ;
• un florilège des articles les plus marquants en 2016 ;
• un article rédigé par un jeune confrère interne sur l’Immuno-oncologie et le fractionnement de la radiothérapie.
Je tiens à remercier tous les auteurs et reviewers pour leur implication. Nous souhaitons donc que vous preniez autant de plaisir à lire ce premier numéro que nous en avons eu à le construire.
Pr Catherine SAUTÈS-FRIDMAN
Rédactrice en chef de LA REVUE Immunité & Cancer